Symposium sur la néphropathie à IgA de Nanjing,
juin 2013 : vers une nouvelle définition de la maladie
Les
participants médecins et scientifiques étaient nombreux pour assister au
dernier symposium sur la néphropathie à IgA organisé cette année par
l’université de Nanjing en Chine. Ce symposium a lieu environ tous les trois
ans et plusieurs équipes ont présenté cette année de nouveaux résultats de
recherche sur la maladie. La néphropathie à IgA est une maladie rénale
conduisant dans 30% des cas à l’insuffisance rénale et touche le glomérule. Des
dépôts d’anticorps de type IgA caractérise la maladie avec une protéinurie et
hématurie. La seule façon de la diagnostiquer est d’effectuer une biopsie
rénale qui montre alors des dépôts d’IgA et une prolifération des cellules
mésangiales, une conséquence vraisemblable des dépôts qui semblent activer ces
cellules in situ. Une autre
caractéristique de la néphropathie à IgA encore mal comprise est l’anomalie de
glycosylation des IgA. Chez les patients sont retrouvées des IgA
hypoglycosylées (manque de galactose)
dans leur sérum et ces IgA se déposent dans le rein. L’origine de cette hypoglycosylation
n’est pas clairement déterminée. Il a en effet été montré que chez 50% des
patients, cette caractéristique est héritée. De plus, des infections pourraient
induire cette anomalie. La néphropathie à IgA est donc une maladie complexe
semblant associer facteurs génétiques et environnementaux, un seul évènement
n’est pas suffisant à induire la maladie.
Le
nouvel état des lieux au symposium montre une répartition des patients atteints
de la néphropathie à IgA très hétérogène dans le monde. Certaines régions sont
très touchées en Asie comme le Japon et la Chine de l’est où les cas de
néphropathie à IgA peuvent représentés de 15 à 45% des biopsies rénales.
L’Afrique et l’Amérique latine sont beaucoup moins touchées, en Europe et aux
Etats-Unis la prévalence de la maladie est d’environ de 0,5%. Les études et
analyses présentées au symposium ont adressé de nombreuses spécialités
différentes. De vastes études de génétique sur des cohortes importantes de
patients (références 2 et 3) en Chine et Etats-Unis/Europe ont pu identifier
plusieurs régions chromosomiques qui semblent caractériser
ces patients Ces analyses ont permis également d’établir un score de risque
génétique de développer la maladie qui corrèle bien avec la répartition
géographique de la maladie (Figure 1, extraite de la référence 1). Les analyses
des gènes trouvés dans ces régions sont actuellement en cours. Ils pourraient
permettre de comprendre les mécanismes pathologiques de la maladie et de
trouver de nouvelles cibles thérapeutiques.
Notre
groupe (INSERM U699, équipe qui s’intéresse aux immunorécepteurs et pathologies
rénales) a identifié le récepteur aux IgA : le CD89 comme molécule
participant à la pathogénie de la maladie. En effet, on retrouve ce récepteur
soluble également déposé dans les glomérules des patients (référence 4).
D’autres équipes ont montrés des dépôts de molécules du complément (molécules
impliquées également dans les réponses immunes et ici inflammatoires) associées
aux dépôts d’IgA. Donc ces dépôts contiennent des IgA mais aussi plusieurs
autres molécules associées et certainement d’autres encore non identifiées. Ces
dépôts activent les cellules mésangiales qui possèdent un récepteur aux IgA (le
TfR), induisant leur prolifération. Elles produisent également plus de
récepteurs TfR et une autre protéine la transglutaminase 2 (référence 4)
stabilisant les dépôts et aggravant le processus. Enfin, ces cellules
produisent également de petites molécules chimiques appelées cytokines qui
attirent les cellules immunitaires induisant une inflammation plus grande. Une
équipe suédoise a montré au symposium que lorsqu’ils extraient les cellules
mésangiales de biopsies de patients atteints de néphropathie à IgA, ces
cellules sont plus réactives aux IgA que des cellules d’autres patients
(référence 5). L’origine de cette hyperactivation des cellules des patients
n’est pas connue, elle pourrait résulter de l’activation continue par les IgA
des cellules mésangiales des patients rendant ces cellules hypersensibles aux
IgA ou avoir une origine génétique.
Pour
conclure ce congrès, une nouvelle définition de la néphropathie à IgA a émergé
des nouveaux résultats. La maladie est n’est pas seulement caractérisée par des
dépôts d’IgA polymériques dégalactosylées mais ils sont associés à des dépôts
de CD89 et de molécules du complément (C3 et MBL) avec une prolifération des
cellules mésangiales. Cette maladie reste complexe mais de nouvelles pistes
semblent prometteuses.
Références
1.
Kiryluk K et al. Plos Genet 2012
2.
Yu XQ. et al. Nat Genet 2012
3.
Gharavi AG. et al. Nat Genet 2011
4.
Berthelot L. et al. J Exp Med 2012
5.
Ebefors K. et al. Présentation au symposium de Nanjing 2013.
Légende de la Figure 1 :
Analyse du risque géo-spatial dans le monde de la
néphropathie à IgA en fonction des études génétiques.
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