jeudi 1 novembre 2018

Recherche médicale IgA

Point sur la recherche fait en 2014

Recherche en cours sur les glomérulonéphrites, Centre de Recherche sur l’Inflammation, INSERM U1149

Les mastocytes et glomérulonéphrites
Blank U, Danelli L, INSERM U1149.
Daugas E, Service de néphrologie, Hôpital Bichat.

En plus de leur rôle bien connu dans les allergies les mastocytes ont été reconnus comme d’importantes cellules effectrices de l’inflammation rénale. Les mastocytes sont des cellules d’origine hématopoïétique essentiellement localisées dans les tissus. Chez l’homme, peu de mastocytes résident dans les reins de sujet sain, mais dans les maladies rénales leur nombre augmente sensiblement dans l'infiltrat interstitiel de cellules inflammatoires. Leur présence a été longtemps interprétée comme une contribution à la pathologie. Cependant, des données récentes obtenues grâce à des modèles expérimentaux de pathologies rénales chez la souris ont souligné le rôle complexe, parfois ambivalent,  des mastocytes et de leurs médiateurs. En effet, des recherches menées dans les souris déficientes en mastocytes du fait d’une mutation naturelle (souris Wsh/Wsh) ou des souris invalidés génétiquement pour une protéase mastocytaire, la chymase MCPT4 (souris Mcpt4-/-) ont montré que les mastocytes peuvent, selon les circonstances, promouvoir ou inhiber les maladies rénales. Ainsi, dans un modèle de glomérulonéphrite  induit par injection d’anticorps dirigée contre la membrane basale glomérulaire l’absence de mastocyte est néfaste, ce qui montre que les mastocytes y exercent globalement un rôle protecteur. Néanmoins, dans le même modèle, l’absence de la chymase mastocytaire MCPT4 a un effet protecteur ce qui démontre son effet délétère. Cet effet protecteur global des mastocytes et l’effet aggravant d’un de leurs effecteurs (la MCPT4) démontrent la dualité de ces cellules au cours des maladie rénales inflammatoires. Cette complexité est encore accrue au regard de résultats obtenus dans des modèles de fibrose rénale ou certaines équipes ont rapporté des effets bénéfiques des mastocytes et de la chymase MCPT4 alors que d’autres ont rapporté un effet néfaste. Il semble que l’environnement physiologique, la type de maladie rénale et/ou la phase de la maladie rénale gouvernent la mise en œuvre d’un rôle protecteur ou aggravant des mastocytes et leurs effecteurs.  
Cette complexité du rôle des mastocytes au cours des maladies rénales doit être interprêtée comme une richesse et une chance pour la Néphrologie. En effet, l’identification de leurs mécanismes, qu’ils soient pro- ou anti- maladies rénales, constituent un réservoir d’investigations qui doivent permettre l’identification de nouvelles cibles d’interventions pharmacologiques qui permettront le contrôle des maladies rénales. C’est tout l’enjeu auquel s’assigne quotidiennement notre équipe.

Le lupus systémique érythémateux
Charles N, Pellefigues C, Dema B, INSERM U1149
Daugas E, Jablonski M, Service de néphrologie, Hôpital Bichat.
Sacré K, Papo T, Service de Médecine Interne, Hôpital Bichat.

Le lupus systémique érythémateux est une maladie auto-immune d’origine multifactorielle qui atteint principalement (à 90%) des femmes en âge de procréer. Cette maladie systémique se caractérise par la présence d’anticorps réagissant contre le soi, et notamment contre des antigènes nucléaires (ADN et protéines associées). Le lupus peut atteindre différents organes (peau, articulation, système nerveux…), mais l’atteinte rénale de cette pathologie (néphrite lupique) peut être particulièrement grave et mener à une insuffisance rénale terminale nécessitant une transplantation (Rahman & Isenberg, 2008). Comme la plupart des maladies auto-inflammatoires chroniques, aucun traitement spécifique n’est actuellement disponible contre la néphrite lupique, et les poussées de la maladie sont contenues grâce à des traitements agressifs avec des immunosuppresseurs et des corticostéroïdes (Daugas, 2008). Les granulocytes basophiles sont les globules blancs les moins représentés dans la circulation (moins de 1% des leucocytes) et sont connus pour leurs implications dans les allergies et la lutte anti-parasitaire. Comme les mastocytes, les basophiles sont capables de lier les IgE, ces anticorps particuliers responsables des symptômes de la plupart des maladies allergiques. Des découvertes récentes ont permis de démontrer que les basophiles avaient également un rôle très important dans la régulation physiologique du système immunitaire (Charleset al., 2009Karasuyamaet al., 2011).
Grâce à un modèle murin spontané de lupus, nous avons pu récemment mettre en évidence que les basophiles et les IgE autoréactives (reconnaissant des molécules du soi) avaient un rôle central dans l’amplification de la production des autoanticorps via leurs effets sur les lymphocytes B et T autoréactifs au cours du lupus (Charleset al., 2010). Une approche translationnelle nous a permis de confirmer cette hypothèse en analysant le profil d’activation des basophiles dans le sang des patients lupiques. Si tous les patients analysés avaient des basophiles activés, cette particularité était d’autant plus marquée chez les patients lupiques ayant une atteinte rénale (Charleset al., 2010Pellefigues & Charles, 2013). Ces découvertes sont en cours de validation sur un grand nombre de patients et ont permis d’identifier les basophiles et les IgE comme cibles thérapeutiques potentielles dans la maladie lupique. Des traitements contre les IgE chez les patients allergiques existent et sont actuellement utilisés dans certaines formes sévères d’asthme allergique et d’urticaire auto-immun (Charles & Rivera, 2011). Un essai clinique a été initié afin de vérifier si un tel traitement pourrait être bénéfique aux patients atteints de néphrite lupique.

La néphropathie à IgA :
Monteiro R, Berthelot L, Chemouny J. INSERM U1149
Vrtovsnik F, Daugas E, Jablonski M, Service de néphrologie, Hôpital Bichat.
E. Pillebout. Service de néphrologie, Hôpital Saint Louis.

La néphropathie à IgA (NIgA) est une maladie rénale caractérisée par des dépôts d’anticorps (de type IgA) au niveau des unités de filtration du rein : les glomérules. Trente pour cent des patients atteints de NIgA progressent vers l’insuffisance rénale nécessitant dialyse et greffe. Aucun traitement curatif n’existe. La maladie est plus fréquente chez les hommes que chez les femmes. Des facteurs à la fois innés (sexe, génétique) et environnementaux (l’alimentation, les infections) semblent être impliqués dans la survenue de cette maladie. La plupart des projets scientifiques de recherche concernant la NIgA sont focalisés sur les anomalies des IgA. Notre équipe de recherche s’intéresse quant à elle aux interactions des IgA avec les récepteurs aux IgA, étape cruciale qui aboutit à des dommages glomérulaires. De plus, nous avons récemment montré que la transglutaminase 2, une enzyme aux activités variées et importantes, participe également à la formation de dépôts d’IgA dans le mésangium. Les dépôts d’IgA sont présents de façon relativement fréquente dans la population générale (5-10%) mais peu de patients (< 0.5 %) vont développer les symptômes cliniques. Par conséquent la seule présence de dépôts ne suffit pas à expliquer la maladie qui semble faire intervenir une combinaison de plusieurs facteurs pour le moment inconnue. Nous étudions donc l’influence des facteurs hormonaux et environnementaux (rôle de l’alimentation et des infections) sur les anomalies des IgA et essayons de déterminer comment ils modulent les interactions entre les partenaires moléculaires clés impliqués dans la NIgA (IgA, récepteurs aux IgA (CD89 et CD71), transglutaminase 2) afin de les rendre pathogéniques et d’activer les cellules mésangiales. Comprendre les mécanismes physiopathologiques impliqués dans la NIgA va permettre de pouvoir développer de nouvelles thérapies. 

Le purpura rhumatoïde : Etude HSPronostic
Monteiro R, Berthelot L, Jamin A, Housset P. INSERM U1149
Pillebout E, Service de néphrologie, Hôpital Saint Louis.
Bruzzoni-Giovanelli H, CIC, Hôpital Saint Louis.

Le purpura rhumatoïde (PR) est une vascularite à IgA, pouvant associé une atteinte cutanée, articulaire, gastro-intestinale et rénale, survenant par poussées. Sa gravité est extrêmement variable d’un individu à l’autre, et le pronostic dépend essentiellement del’atteinte rénale. Le PR est considéré comme la forme systémique de la néphropathie à IgA (N-IgA), dont les mécanismes physiopathologiques sont mieux connus. Lors du diagnostic de PR, il n’existe pas de facteur prédictif d’atteinte rénale, en dehors de facteurs non spécifiques (protéinurie, insuffisance rénale).L’évolution spontanément favorable de patients ayant une forme clinique et histologique initiale sévère et à l’opposée l’évolution vers l’insuffisance rénale chronique de patients avec une symptomatologie rénale initiale minime complique considérablement les décisions thérapeutiques et l’élaboration des études cliniques. Les patients sont en effets exposés d’un coté au risque d’effets secondaires de traitements inutiles et de l’autre coté au risque de dégradation de la fonction rénale s’ils sont insuffisamment traités.
Le but de notre étude est de mettre en évidence des bio-marqueurs pronostiques permettant de classer les patients selon leur susceptibilité à évoluer vers l’insuffisance rénale chronique, préalable indispensable aux futures études cliniques proposant un traitement adapté au niveau de risque du patient.
Pour cela nous étudions :
-                                 Le profil biologique de patients en poussée cutanée selon la présence d'une atteinte rénale :Taux d'Ig plasmatiques et urinaires ; glycosylation des IgA ; expression membranaire de CD89 des monocytes ; taux de complexes immuns etplasmatiques et urinaires ;profil cytokinique plasmatique et urinaire, profil protéomique urinaireet mesure du marqueur NGAL d’insuffisance rénale chronique.
-                                 L’histologique rénale et cutanée : Dépôt des complexes immuns; expression des récepteurs de l’IgAet l’activation du complément (complexe C5b9).
-                                 Des variantes alléliques de 1.670 gènes présélectionnés pour établir le profil polymorphique de chaque patient (16,561 SNPs «Single Nucleotide Polymorphism») par la technique "Infinium i-select" et ainsi identifier une susceptibilité génétique particulière.
Notre étude est prospective et multicentrique (Ile de France, Valencienne, Toulouse). Elle a inclus, entre avril 2010 et janvier 2013, des patients en poussée cutanée de purpura rhumatoïde, avec ou sans atteinte rénale (DFG>60 ml/min; Pu<0 18="" 2="" accord="" active="" adultes.="" ans="" atteinte="" ayant="" crit="" cutan="" de="" depuis="" des="" donn="" e="" enfants="" exclus="" g="" hu="" immunosuppresseurs="" les="" mm3="" moins="" n="" nbsp="" o:p="" ou="" participation.="" pas="" patients="" re="" sans="" semaines="" son="" sont="" u="">
A ce jour, nous avons inclus 124 patients dont 48 enfants. 77 patients ont une atteinte rénale au diagnostic, ils sont plus alors plus âgés (43,3 vs 29,2 ans). L’atteinte rénale se caractérise par la présence d’une hématurie microscopique dans 92% des cas, une protéinurie en moyenne à 3,1+/-4,2 g/g et une fonction rénale en moyenne normale (97,9 ml/min). Quatre patients sont décédés au cours du suivi. Les données de suivi sont disponibles maintenant pour 100 patients (24 en attente).

Le syndrome néphrotique idiopathique de l’enfant
Jamin A, Dehoux L, Dossier C, Deschênes G, Service de Néphrologie Pédiatrique, Hôpital Robert Debré. 
Monteiro R, INSERM U1149.

Le syndrome néphrotique idiopathique (SNI) apparait comme une pathologie du système immunitaire encore mal caractérisée. L’âge de début de SNI correspond à l’âge des primo-infections virales de l’enfant et les poussées sont souvent précédées d’infections bénignes des voies respiratoires. Différents récepteurs appelés « Toll-like » (TLR), qui sont entre autres localisés dans les leucocytes sanguins, reconnaissent les bactéries et les virus, ce qui permet d’induire les mécanismes de défense de ces cellules du système immunitaire contre ces microbes. Nous avons observé que l’expression du TLR3 est diminuée dans les leucocytes des patients en poussée comparés à ceux en rémission en corrélation avec la protéinurie. Les protéines dépendant du TLR3 sont constitutivement activées dans les leucocytes de tous les patients, en corrélation avec une production accrue d’interféron alpha sanguin qui a un rôle de défense contre les microbes. La réponse immunitaire dirigée contre les microbes via le TLR3 des leucocytes sanguins est donc étroitement liée à la pathogénèse du SNI. 
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Par ailleurs, le rein est probablement la cible fonctionnelle d'un facteur soluble circulant à l’origine de la dysfonction des cellules de la barrière de filtration rénale appelées podocytes. Mais ce facteur n’a encore jamais été identifié. Nous avons montré très récemment que les petites protéines présentes dans le plasma des patients en poussée, mais pas des patients en rémission, provoquent la désorganisation de la structure des podocytes in vitroet diminuent leur viabilité. Ce phénomène est réversible lorsque ces protéines sont neutralisées par certains anticorps. Nous allons maintenant chercher à caractériser précisément les protéines à l’origine des dysfonctions des podocytes car cela pourrait conduire à plus long terme à de nouvelles approches thérapeutiques.


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