La Néphropathie à IgA ou maladie de Berger
Découverte en 1966 par le Professeur Jean Berger à l’hôpital Necker, la néphropathie à IgA (NIgA) se caractérise par des dépôts anormaux d’anticorps : les immunoglobulines A (IgA) au niveau du mésangium rénal. Cette région rénale très particulière fait partie du glomérule, l’unité de filtration du rein. Le sang passe dans des capillaires au niveau du glomérule et est filtré par une barrière formée de plusieurs couches, laissant passer les déchets (comme l’urée) et retenant les protéines et cellules. Le mésangium, constitué par les cellules mésangiales, sert de soutien du glomérule et possède des propriétés contractiles. Le diagnostic de la maladie se réalise donc par biopsie rénale et observation de la présence des dépôts d’IgA.
Epidémiologie
La néphropathie à IgA est une maladie fréquente touchant 0,5 à 1% de la population en Europe et aux Etats-Unis, et jusqu’à 15% au Japon. L’état de la fonction rénale peut se dégrader chez certains patients. Ainsi 30 à 40% des patients évoluent vers l’insuffisance rénale après 20 ans de maladie. 10% des transplantations rénales en France ont pour origine cette maladie. Les hommes sont plus touchés que les femmes (environ 70% des patients sont des hommes). L’âge de début de la maladie correspond majoritairement au jeune adulte.
Symptômes et diagnostic
Les patients découvrent souvent leur maladie par la présence visible de sang dans leurs urines. On appelle cette présence de globules rouges dans les urines : hématurie macroscopique. Le plus souvent, cette hématurie n’est pas visible et n’est découverte que par des examens de dépistage à l’aide d’une bandelette urinaire (hématurie microscopique). A la présence d’hématurie, s’associe souvent la présence anormale de protéines dans les urines (ou protéinurie). Ce sont les signes que la filtration rénale ne fonctionne plus et laisse passer des protéines normalement retenues par les filtres. Une protéinurie supérieure à 0,5 g par jour va impliquer des examens plus poussées et une biopsie rénale, indispensable pour confirmer le diagnostic.
Physiopathologie
La ou les causes de la maladie ne sont pas connues. Cependant, on suspecte des facteurs environnementaux et génétiques. Les dépôts d’IgA semblent induire des lésions au niveau des glomérules et une inflammation délétère, empêchant une filtration normale du sang. Plusieurs études scientifiques semblent montrer que les IgA circulantes dans le sang des patients atteints de NIgA présentent des anomalies structurelles (liées à la glycosylation), facilitant leurs dépôts dans les reins. De plus, les patients greffés, récidivent souvent (dans environ 60% des cas) et présentent à nouveau des dépôts d’IgA dans le rein greffé (provenant du donneur). Ces données semblent montrer que c’est un facteur circulant qui est à l’origine de ces dépôts. Des études génétiques de familles, dont plusieurs membres sont atteints de glomérulonéphrites, ont montré l’implication de gènes responsables de la glycosylation. Cependant, certains membres de ces familles possèdent ces IgA anormales et n’ont aucun symptôme de la maladie. La présence de ces gènes ne semble donc pas suffisante. On suspecte également des facteurs environnementaux comme facteurs déclencheurs de la maladie chez des individus génétiquement prédisposés. Ainsi, la découverte d’hématurie est souvent précédée d’une infection des voies respiratoires. Des réactions immunitaires contre des antigènes alimentaires pourraient également être impliquées. Les recherches menées actuellement tentent à décrypter l’origine de la formation des dépôts d’IgA et les facteurs impliqués. Il est également important de découvrir quels patients vont évoluer vers l’insuffisance rénale et trouver des marqueurs de pronostic d’une fonction rénale qui va rester stable ou de celle qui va se détériorer.
Traitements
Malgré les avancées dans la compréhension des mécanismes pathologiques de la maladie, aucun traitement spécifique n’existe pour le moment, en particulier ceux ciblant les IgA anormales. Les stratégies de traitements actuelles se focalisent sur la protection du rein en bloquant le système rénine-angiotensine (jouant sur la tension artérielle et la diminution de la protéinurie). Lorsque la fonction rénale se dégrade rapidement, des traitements plus agressifs ciblant l’inflammation sont préconisés (des immunosuppresseurs comme les corticoïdes, l’azathiopine, le cyclophosphamide…). En cas d’insuffisance rénale, la dialyse et la transplantation sont malheureusement requises. Les équipes de chercheurs continuent à explorer les mécanismes de dépôts et les facteurs impliqués afin de fournir de nouvelles thérapies.
Un autre article de sa part et faisant le point sur ses recherches paraîtra en octobre dans la revue Rein échos numéro 13.